Caractérisation structurale d'archéomatériaux par spectrométrie de masse: lipidomique, protéomique et développement méthodologique

Les biomatériaux du Patrimoine liés aux œuvres d’art ou aux vestiges archéologiques constituent de véritables témoins des civilisations passées susceptibles de livrer des informations tant culturelles que sociétales, historiques, économiques ou environnementales. A l’interface entre archéologie, histoire, chimie des substances naturelles et chimie analytique, leur étude structurale précise reste cependant un véritable challenge du fait de la complexité des matériaux, de leur dégradation anthropique ou naturelle et du caractère précieux des échantillons. Cette thématique d’archéométrie biomoléculaire a bénéficié des progrès de la spectrométrie de masse réalisés ces dernières décennies, technique qui est devenue un outil de choix et qui maintenant fait l’objet de développement spécifique. La caractérisation de ces bioarchéomatériaux est basée sur l’identification structurale de marqueurs moléculaires permettant non seulement de déterminer les origines biologiques (voir géographiques) mais également de comprendre les processus d’altération. Si l’étude des lipides bas poids moléculaires au moyen de techniques tels que chromatographie en phase gazeuse couplée à la spectrométrie de masse (GC/MS) ou chromatographie liquide haute performance couplée à la spectrométrie de masse (LC/MS) reste d’actualité, nos travaux de recherche actuels s’orientent vers une nouvelle gamme de composés encore peu étudiés : les biomolécules (protéines hydrosolubles ou membranaires par exemple) et les lipides de poids moléculaires élevés. Les techniques utilisées sont celles de la protéomique avec des appareillages tels que MALDI-TOF ou nanoLC-Q-TOF. Les protocoles doivent cependant être adaptés à ce contexte particulier.


Développement méthodologique : l’exemple de la TLC-MALDI-TOF

Support TLC directement introduit dans la source du spectromètre de masseLe couplage entre la chromatographie sur couches minces (thin layer chromatography TLC) et la spectrométrie de masse date des années 1980. Il s’effectuait alors de manière indirecte, ce qui nécessitait le plus souvent la récupération des analytes par différentes méthodes complexes, avant leur analyse par spectrométrie de masse. Le couplage direct TLC-MALDI a été développé dans les années 90 pour l’analyse de peptides (800-1300 Da) et de petites protéines (3000-19000 Da). Le challenge analytique de ces travaux de recherche est d’appliquer ce couplage à des systèmes complexes présentant des composés de nature différente (structure, polarité, masse moléculaire, etc.), ce qui permet également de tester les limites de cette technique en termes de quantité d’échantillon à mettre en jeu. Cette approche est complètement différente de celles décrites jusqu’à présent puisque ces dernières s’appuyaient sur des composés de nature similaire. Le développement est à mettre en place spécifiquement pour deux types de systèmes complexes pour lesquels il existe un questionnement réel et un besoin de caractérisation structurale par spectrométrie de masse important. Le premier concerne les archéomatériaux organiques. Ce type d’échantillons possède en effet une composition chimique extrêmement complexe, qui a été modifiée au cours des siècles ou des millénaires par des altérations anthropiques ou environnementales. Pour caractériser au mieux ces systèmes, il est donc nécessaire d’arriver à une identification structurale et moléculaire la plus précise possible, tout en utilisant un minimum de matière pour conserver l’intégrité des matériaux et artefacts étudiés. Le deuxième questionnement présente un lien direct avec la biologie cellulaire. Certaines protéines membranaires ne présentent une activité que lorsqu’elles sont en association avec des lipides (lipides membranaires – phospholipides, glycolipides –). Le but est de pouvoir caractériser à la fois ces lipides et les protéines associées sur des quantités moindres, seules disponibles en biologie cellulaire.


Contact

Dr. Armelle CHARRIE

Chargée de recherche CNRS

Tel : +33 (0) 3 68 85 16 11
acharrie@unistra.fr

Armelle Charrié