Développement de méthodes d'étude

Spectroscopie Infrarouge Différentielle

Elle permet d'observer au niveau moléculaire l'action des protéines et sa combinaison avec les techniques de perfusion donne accès à des informations sur l'interaction protéine-substrat.  La spectroscopie IR couplée à l'électrochimie permet de suivre les réactions de protonation couplées au transfert d'électron et de fournir des informations essentielles sur la structure, la fonction et la dynamique de l’enzyme. La technique est bien établie dans l’IR moyen pour l'étude de l'état de protonation de différents acides aminés, et la détermination de la structure secondaire. Des changements structuraux peuvent être observés dans la région de la bande amide I (1700 et 1600 cm-1) qui correspond aux vibrations ν(C=O) du squelette polypeptidique. La région amide II (1580-1520 cm-1) comprend les vibrations d’élongation C-N et de déformation N-H du squelette polypeptidique et peut fournir également des informations sur les réarrangements structuraux. Les contributions spécifiques d'acides aminés individuels peuvent également être observées, notamment les résidus acides au dessus de 1700 cm-1.

Voir par exemple Hellwig et al., 1998; Friedrich et al., 2010; Lee et al., 2011.


Spectroscopie Infrarouge Lointain

Les études à des fréquences plus basses (en dessous de 800 cm-1) sont en plein essor. Cette gamme spectrale montre des contributions intéressantes des vibrations métal-ligand, en particulier les vibrations Fe-S des clusters Fer-Soufre (cf figure) et les vibrations Fe-N des hèmes, des vibrations des cycles aromatiques dépendantes de l’état de protonation, ainsi que les modes de respiration de la protéine. Aux très basses fréquences, les signaux des liaisons hydrogène et des modes de «respiration» peuvent être observés. Des sources lumineuses conventionnelles (lampe à mercure) et synchrotron (Anka, Bessy II) sont utilisées  pour la caractérisation des cofacteurs des protéines solubles et membranaires de la chaîne respiratoire de différents organismes. Par couplage avec l'électrochimie, il est possible de suivre la réorganisation des vibrations métal-ligand vibrations et des liaisons hydrogène lors du transfert d'électrons.

Plus de détails dans El Khoury et al., 2010; El Khoury et al., 2011.


Spectroscopie Raman

Cette technique est complémentaire de la spectroscopie infrarouge. Elle consiste à envoyer une lumière monochromatique sur l'échantillon à étudier (qui est porté dans un état dit « virtuel ») et à analyser la lumière diffusée. Un grand avantage de cette technique est la faible diffusion de l'eau qui permet de travailler en solution aqueuse. En sélectionnant judicieusement la fréquence d'excitation (résonance Raman), il est aussi possible d'observer sélectivement les cofacteurs de la protéine, sans être gêné par le squelette polypeptidique. Les hèmes par exemple présentent des bandes dans la région 1300-1600 cm-1 (exemple du cytochrome c ci-contre), caractéristiques de l'état d'oxydation et du spin du complexe. Les modes pontants et terminaux des clusters Fe-S peuvent être observés entre 300 et 500 cm-1, et sont dépendants de l'environnement du cluster. Le couplage à l'électrochimie permet de suivre les modifications d'environnement des cofacteurs lors des échanges d'électron avec la protéine.

 


Spectroscopies Exaltées de surface

L’intensité des bandes en spectroscopie Raman des molécules proches d’une surface recouverte d'or ou d'argent peut être exaltée d’un facteur 106 (Effet SERRS). De manière similaire mais dans une moindre mesure, l'intensité des signaux en spectroscopie infrarouge peut aussi être exaltée (Effet SEIRAS). Ces effets sont très intéressants dans le cadre des études de molécules biologiques comme les protéines, car ils permettent de travailler à des concentrations plus faibles d'échantillon, sans interférence avec les molécules d'eau de la solution. Les études ont montré l'importance de la topographie de la surface métallique, qui doit être rugueuse à l'échelle nanométrique, et des liaisons entre les molécules et la surface. Nous mettons donc au point des méthodes de modification de surfaces métalliques par déposition chimique pour l'adsorption des protéines membranaires comme le complexe I (figure ci-contre). Nous développons aussi des cellules de mesure permettant de coupler ces spectroscopies vibrationnelles exaltées de surface à l'électrochimie. L'objectif est de suivre les changements au niveau des cofacteurs et des chaînes polypeptidiques qui se produisent dans la protéine lors du passage entre les états réduit et oxydé.

Plus de détails dans Kriegel et al., 2014.


Microscopies Infrarouge et Raman

Les spectroscopies Infrarouge et Raman couplées à la microscopie sont des méthodes non destructives permettant d’obtenir des informations sur la composition et la structure moléculaire d’un échantillon. Ces méthodes sont de plus en plus utilisées dans le domaine de la recherche médicale car elles permettent de caractériser l’état physiopathologique d’un échantillon biologique tel qu’un tissu ou une cellule. En effet, chaque biomolécule posséde des propriétés spectrales bien définies aussi bien en Infrarouge ou en Raman, et donc son spectre vibrationnel apparait comme une véritable empreinte moléculaire. De plus, le couplage des spectroscopies infrarouge et Raman avec la microscopie permet de combiner des informations spectrales avec des informations spatiales via l’accumulation de plusieurs milliers de spectres représentant une image spectrale. Notre objectif est d’appliquer ces méthodes à l’étude de tissus cérébraux atteints de la maladie d’Alzheimer et d'autres pathologies afin d’identifier des marqueurs spectroscopiques pour les différents stades de ces maladies. Ces derniers pourront d’une part, aider à comprendre les mécanismes moléculaires se déroulant au sein du cerveau et d’autre part, permettre de suivre l’effet de différents traitements. La figure ci-contre montre des micrographes infrarouges des ratios d'intensité des bandes à 2925 et 2958 cm-1obtenus pour des tissus cérébraux de souris.


Voltampérométrie

Il s'agit d'un outil puissant pour étudier les propriétés thermodynamiques et cinétiques des protéines, à condition qu’il y ait une bonne communication électronique entre l’électrode et les cofacteurs.  Les protéines membranaires sont plus difficiles à étudier expérimentalement que les protéines solubles, cependant, leurs propriétés électrochimiques sont d'un grand intérêt en raison de leur activité catalytique riche. Nous avons développé une méthode d'immobilisation des protéines membranaires basée sur l'utilisation de nanoparticules d'or modifiées avec des mélanges de thiols. Ces nanoparticules jouent le rôle de relai dans le transfert d’électrons entre l'électrode et les centres redox actifs de la protéine et leur grande surface spécifique permet l'immobilisation d'un grand nombre de protéines. Nous sommes particulièrement intéressés par l'activité électrocatalytique des protéines membranaires immobilisées sur de tels supports.

Pour plus de détails, voir Meyer et al., 2011; Melin et al., 2013; Meyer et al., 2014.